Causons avec émotion et sentiment

En 1974, deux psy publient une expérience restée fameuse sur l’effet de l’état physique sur l’attraction sexuelle. “Some Evidence for Heightened Sexual Attraction Under Conditions of High Anxiety”.
L’expérience met en scène un lieu stressant où une personne en détresse rencontre quelqu’un du sexe opposé.

Dans le cas en question, une femme séduisante qui attend des volontaires à l’issue d’un haut pont suspendu et étroit de plus de soixante mêtres de haut. Ils doivent alors participer à une étude en écrivant un bref récit basé sur une photo. Ensuite, la femme donne son numéro de téléphone au cas où le volontaire voudrait « en reparler ». On refait l’expérience avec d’autres cobayes sur un pont quelconque.

Résultat: la moitié des participants du pont suspendu appellent la femme, contre seulement un sur huit franchissant le pont normal. De plus, les premiers donnent des récits plus « sexualisés ».

L’étude conclue à une «mauvaise attribution de l’excitation», un phénomène dans lequel les gens interprètent mal la cause de leur état physique extrême. Ils attribuent l’augmentation de leur fréquence cardiaque et leurs mains moites à la femme séduisante plutôt qu’au pont.

Ainsi donc, une petite quantité de stress peut aider à stimuler les sentiments amoureux. Autrement dit, lorsqu’on ressent un attrait intense pour quelqu’un, on ne devrait pas toujours en déduire trop de choses…(la jeunesse semble avoir une connaissance intuitive de ce fait, lorsqu’on invite une future conquête à voir un film d’horreur…).

La morale de l’histoire, c’est que nous ne savons pas toujours ce que nous ressentons, ni comment l’interpréter, ce qui nous empêche de faire des choix éclairés.
On croit prendre des décisions rationnelles en oubliant que des facteurs physiques peuvent brouiller les pensées. On sait par exemple, que quand on fait les courses l’estomac vide, la sensation de faim vous pousse à acheter trop de nourriture, souvent de mauvaise qualité.

CHIMIE

En 1980, le neurologue Avram Goldstein administre à des étudiants de la naloxone et leur fait ensuite écouter leur musique préférée.

iLa naloxone empêche la libération de dopamine dans le système de récompense du cerveau, et freine la sensation de plaisir. Elle supprime cette euphorie proche de celle des opiacés et on l’utilise notamment dans les désintoxication pour rompre l’association entre le produit et l’état psychique.

Après une dose de naloxone les cobayes écoutant leur musique préférée ressentent moins de sensations corporelles positives. Les voies chimiques qui entraînent la sensation d’émotions intenses sont interrompues, dont la dopamine, qui est le produit «de récompense».

Les émotions accompagnant nos prédictions provoquent l’attente qui est récompensée lors d’un but au foot, un cadeau surprise, une bonne blague. La dopamine réagit aux prédictions qui se révèlent vraies, la récompense étant d’autant plus forte que la prédiction est peu probable (c’est pourquoi le jeu peut créer une dépendance).

Alors, les émotions et sentiments seraient de la pure chimie ?

(Entre parenthèses, les pesticides organophosphorés utilisés actuellement sont nés des recherches sur les gaz de combat et le suicide par absorption de pesticides fait plus de 300.000 morts par an en Inde et en Asie).

Mes frères, le combat est intérieur.

Le neurologue Sébastien Bohler vient de publier un bouquin intitulé :
« Le bug humain. Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la planète et comment l’en empêcher » (Robert Laffont, 2019). Il confirme en substance que le cerveau est un instrument ambivalent. A l’origine de nos nombreux progrès, il est cependant limité par cette chimie du plaisir immédiat.
C’était utile à nos ancêtres pour survivre en encourageant à consommer, à se reproduire à s’assurer un statut social à court terme.
C’est devenu la cause de notre difficulté actuelle à penser le long terme.  Suralimentation, surconsommation matérielle, addiction aux films pornographiques, aux jeux-vidéos et aux réseaux sociaux, le besoin de survivre disparaît, mais cet instinct goinfre survit. On préfère des désirs immédiats, l’ici et le maintenant, plutôt les choix rationnels.


« Tant que notre liberté est uniquement celle de consommer, de rouler au charbon et de polluer autant qu’on veut, c’est un esclavage »
« On vit dans la traînée terminale d’un monde qui n’a plus de sens… On n’aurait jamais réussi à détruire le monde sans cette intelligence incroyable. »


Seules parades selon cet auteur: l’éducation, l’altruisme ou la reconnaissance qui peuvent aussi activer la dopamine, sinon; il sera bientôt trop tard si on n’investit pas énormément dans un changement de comportement fondamental dans l’humanité.


« Après moi le déluge » ? ricane Louis XV (ou Mme de Pompadour). Les belges préfèrent dire : après moi les mouches … Et à propos, on m’a signalé que le lien « procrastination » n’était pas bon; en voilà un autre:

https://www.youtube.com/watch?v=UCZgKvCFlvg


Portez vous bien !

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