niouz n°3 – mémoires

Salut à tous !

Je reviens sur la mémoire, c’est fait pour ça !
Une recherche récente évalue notre potentiel de mémoire à plus d’un pétaoctet. Pour ceux qui l’ignorent, un pétaouchnock c’est un million de milliards d’octets, capacité véritablement phénomémale. Avec ça, on pourrait se souvenir de chaque instant de sa vie dans le moindre détail, de chaque son, odeur, paysage, visage croisé, page lue… Et il resterait encore de la place.
Alors comment se fait-il que je ne sais jamais où j’ai mis les clefs ?

Je sais : à cause de la prégnénolone, qu’on a longtemps appelée hormone de l’oubli. Y’a aussi la préséniline, protéine bien nommée, et comme par hasard, on découvre que c’est peut-être leur absence qui explique Alzheimer, ça a l’air contradictoire, mais bon…

Après avoir beaucoup regardé une émission de télévision qui s’appelait « Star Académie », j’ai énormément progressé dans le domaine philosophique et spirituel.
Et puis un jour, j’ai entendu le patron de la plus grande chaine de télé dire que son métier consistait à « fournir à Coca Cola du temps de cerveau disponible ».
Et la lumière fut ! Du temps de cerveau disponible. A fournir à Coca Cola… Bon sang, ça éblouit ! Incroyable, stupéfiant…
Pourquoi ça n’a pas fait tilt pour tout le monde ? Du temps de cerveau… Disponible: « dont on peut disposer, qu’on peut utiliser librement »(Larousse).
Donc, ce gars vend notre temps de cerveau à Caca calo qui en dipose librement. Bon, d’accord.

On Est Idiots ?

En 2008 un certain Carr publiait un article retentissant: « Google rend-il idiot ? » La consommation d’information et de divertissement transformerait notre façon de
mémoriser. De plus en plus, la mémoire à court terme suffit, la mémoire à long terme se voit remplacée peu à peu par Internet. Sur Wikipédia, Google, le GPS, YouTube, des mots-clés permettent de tout retrouver, auteurs, musiques, citation, lieux, films, plus besoin de retenir ces informations car on sait qu’on y aura accès sans effort.
En 2008, le citoyen type lisait 100.000 mots par jour, sans acquérir beaucoup de connaissances supplémentaires. Cette lecture était déja une forme de consommation.
Notre cerveau semble inadapté à la surinformation. Ceux qui engouffrent des séries TV à haute dose savent qu’ils retiennent moins bien le contenu des épisodes que ceux qui en regardent peu.

Chouette, Des Chiffres

Notre corps est composé de 100 trillions de cellules et mille milliards d’organismes colonisent nos tripes. Notre cerveau réalise 38 000 trillions opérations par
seconde et stocke facilement 4000 téraoctets en mémoire. Pas la peine d’aller vérifier, faut me faire confiance. Je l’ai lu et d’ailleurs, les données scientifiques
comme la météo, ça change tout le temps. Ce qu’il faut retenir, c’est l’ordre de grandeur. Et c’est déjà pas mal.

En 2013, on a bricolé un ordinateur réproduisant la puissance de calcul du cerveau. Avec 82944 processeurs, il a refait les 38 000 trillions d’opérations que nous faisons parait-il en une seconde. Oui madame.
L’ordinateur a mis 40 minutes. Mais depuis, la puissance de calcul dépasse le cerveau en haut de la côte.
J’ai déjà du mal avec un simple calcul de pourcentage alors je me demande comment on peut affirmer que je fais 38 000 trillons d’opérations par seconde.
Le seul fait d’y penser augmente vertigineusement ce chiffre, non ?

Je me demande quel est le coût de chaque seconde de cerveau disponible. Autre chiffre à réfléchir, l’évaluation par les assurances du coût d’une vie humaine est de 3 million s d’euros.
Je continue de consommer des chiffres malgré que les chiffres, aussi précis soient-ils, on leur fait dire ce qu’on veut, à environ 96,3527 %.
News, mails, pubs, potins, crises, modes, politique, économie, tweets, réseaux, videos, climat, pollution, on a dépassé depuis longtemps le moment où la masse
colossale d’informations produites par le numérique nous gave sans espoir de digestion.
En un an, cela représente 50 millions de fois l’ensemble des informations contenues dans tous les livres écrits depuis l’aube des temps.
Enorme surcharge de nouveautés qui pourrait avoir des effets dévastateurs.
Mon cerveau n’a toujours pas la fibre. On est dépassés et notre capacité de réflexion ne cesse de régresser.

L’habitude peut compenser la mémoire, elle économise de la pensée et de la réflexion. Fais comme, c’est prouvé et éprouvé par les anciens, fais comme ça, l’expérience montre que faire autrement conduit à des ennuis.
Tu te souviens ? On te flanquait une baffe si tu gaspillais du pain pour te rappeler que dans ce monde, le pain est pénible à gagner. Maintenant qu’on en fout des tonnes à la poubelle, le modèle a changé, jusqu’au prochain virage. Reste la pensée réactionnaire…
On nous prend souvent pour des boeufs, en voilà une preuve, livrée gratos.

BIDON

Une étude récente proclamait qu’un certain médicament réduit le risque d’infarctus de 36,7 %. C’est énorme ! Sur 100 personnes, disait le labo, on aurait 36,7 fois moins d’infarctus en avalant ça. En fouillant un peu, on découvre comment ce chiffre a été établi.
Pendant toute la durée de l’étude, on a donné des cachets à 10.000 personnes, parmi lesquels 5.000 recevaient un placebo. A la fin de l’étude, 97 % des ingurgitateurs de placebo n’ont pas eu d’infarctus, chiffre qui passe à 98,1 % avec le médoc. Il y a donc 1,1 % de différence, on est bien d’accord ?
Les malheureuses victimes s’elevaient à 3 % d’infarctus avec placebo contre 1,9 % avec le médoc. Tu suis toujours ?
C’est là qu’il faut être attentif, la réduction de 3 à 1,9 est de 36,7 %. Voilà madame, comment on peut prétendre que le médoc réduit de 36,7 % le risque
d’infarctus !
Cette fois, tu vois ce que je veux dire avec cette histoire de temps de cerveau disponible ?

Il y avait aussi ce diacre ignare d’un village perdu au fond de l’Ukraine, de l’Oural ou du Caucase, je ne me souviens pas exactement. Il a tenu pendant quarante ans les annales de sa paroisse dans les années 1860.

Or ce village comptait dès les années 30 un nombre considérable de cent-vingtenaires (gens dépassant 120 balais).
Interrogés, les vénérables vieillards s’étonnaient de l’étonnement général. Naturellement que leurs pères et arrières grand-pères avaient vécu aussi longtemps qu’eux. Et, oui, bien sûr qu’ils mangeaient du yogourt et buvaient de la vodka. Comme une trainée de poudre, la nouvelle a parcouru le monde, comme un mythe.
Il est un village montagnard à l’écart de la civilisation où la vie simple et frugale vous fait des centenaires à la pelle. On s’y marrie à soixante dix ans, on a des enfants à quatre vingt dix, etc.
Voilà comment, par la faute d’un clerc allergique aux chiffres qui officiait des décennies plus tôt, on attribua le double de leur âge à de malheureux quinquagénaires.
La morale pourrait être que  n tiens vallent mieux que 2n tu l’auras.

A propos de vieux, je recommande vivement la (re)vision de ce film visionnaire de Grangier.

https://archive.org/details/LesVieuxDeLaVieille-1960-GillesGrangier

C’est long et ardu, cette niouze. Enfin, Si vous aimez lire cette lettre, signalez la à vos amis, sinon, envoyez la à vos ennemis  !

A bientôt, portez vous bien.

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